Caravansérail — Centre d'artistes

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Nikotwaso

23.03.2023 — 06.05.2023

© Catherine Boivin, Nikotwaso, 2023. Crédit photo: Fanny Basque
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Une exposition de

Catherine Boivin

Une œuvre circulaire

Texte de Jessie Short, commissaire

Le travail de Catherine Boivin est centré sur des évènements qui la touchent personnellement, en tant que femme et mère atikamekw vivant dans une communauté autochtone du Québec actuel. Lors de nos conversations vidéo, j’écoute attentivement Catherine me parler des concepts qui sous-tendent son œuvre, intitulée Nikotwaso. Lors de ces rencontres, la petite fille de Catherine joue en arrière-plan ou grimpe sur ses genoux. Nos discussions tournent autour de divers sujets, notamment nos intérêts actuels pour le cinéma et la télévision, l’art vidéo, les savoirs culturels de nos communautés autochtones respectives, l’importance des langues autochtones et de leur enseignement aux générations futures, ainsi que la violence sexiste dont sont victimes les femmes autochtones au Canada. 

Catherine souligne qu’elle se sent aujourd’hui investie d’une grande responsabilité d’aborder ces problèmes, afin que sa langue et sa culture restent vivantes pour sa fille. De veiller à ce que sa fille vive pour sa culture et sa langue. Il s’agit là de préoccupations qui continuent d’être exprimées par les peuples autochtones. On peut affirmer que, dans ce pays, « un récit national [a été créé et] est fondé sur le génocide des autochtones... Pendant trop longtemps, on s’est intéressé aux cultures autochtones, mais pas aux Autochtones eux·elles-mêmes ni à leur bien-être » [1]. Il n’y a pas de culture sans les personnes dont elle est issue. Pour une jeune femme comme Catherine Boivin, la question des femmes autochtones assassinées et disparues continue de la hanter, comme c’est le cas pour les populations autochtones à l’échelle nationale (y compris au Québec). [2] 

Dans cette exposition, Catherine et les femmes qui participent à son projet courent en cercle sur les moniteurs, évoquant les nombreuses dimensions de leur identité. Elles courent en cercle pour rester actives, pour prendre soin d’elles-mêmes; elles courent en cercle pour refléter les cycles de la vie, y compris les changements de saison; elles courent en cercle pour symboliser les cycles de la violence qui les exposent, en tant que femmes autochtones, à un risque beaucoup plus élevé de subir des violences que les autres populations de femmes du pays. 

Le travail de Catherine est toutefois nuancé; il touche aux récits de traumatismes autochtones tout en allant plus loin. En parlant avec Catherine de Nikotwaso, je suis frappée par les similitudes entre son travail et celui de Dana Claxton, tant sur le plan matériel que conceptuel. Lors d’une conférence d’artiste, Dana Claxton précisait que l’attention qu’elle porte à la mode et aux normes de beauté dans son travail sert à remettre en question l’« impérialisme esthétique » des normes eurocentriques, de son point de vue en tant que Hunkpapa Lakota, et à la « recherche de la beauté et de l’esthétique autochtone ».  [3]

Le travail de Catherine, comme celui de Dana, ne supprime pas les vêtements comme tels, mais y intègre [4] plutôt des éléments culturels. L’intention est d’incorporer des éléments historiques observés sur les vêtements atikamekw portés par les ancêtres de Catherine, comme les jupes à ceinture et à carreaux, tout en ajoutant des éléments de conception inspirés de la vision éclectique de la chanteuse islandaise Björk. [4] 

Nikotwaso est une œuvre de cercles et de cycles. C’est une œuvre circulaire. Catherine conjugue le passé et le futur au présent, avec un regard sur ses grands-mères, sur sa fille et sur les générations futures, tout en faisant référence à divers éléments visuels, qu’ils proviennent de la culture pop, du cinéma et de la télévision, ou de l’esthétique culturelle atikamekw contemporaine et historique. Nikotwaso demande au public de mettre en suspens ses convictions, ou ce qu’il croit savoir des femmes autochtones, et d’entrer dans les possibilités concentriques créées par Catherine Boivin.

L'exposition Nikotwaso est produite et mise en circulation par daphne centre d'art autochtone autogéré


Bibliographie :

Bowen, Deanna, et Maya Wilson-Sanchez. 2020. « A Centenary of Influence », Canadian Art, en ligne : canadianart.ca/features/a-centenary-of-influence-deanna-bowen.

Ryerson Image Centre. 2021. « Artist Talk with Dana Claxton », capsule vidéo, 1h, en ligne : youtube.com/watch?v=zv6qeQTB4Yg.

Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. 2019. Réclamer notre pouvoir et notre place, vol. 1a, 806 p. ; vol. 1b, 386 p., en ligne : mmiwg-ffada.ca/fr/final-report (version anglaise : mmiwg-ffada.ca/final-report)

Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. 2019. Réclamer notre pouvoir et notre place - Un rapport complémentaire : Kepek - Québec, vol. 2., 180 p., en ligne : mmiwg-ffada.ca/wp-content/uploads/2019/06/Rapport-complémentaire_Québec.pdf

(version anglaise : mmiwg-ffada.ca/wp-content/uploads/2019/06/Final_Report_Vol_2_Quebec_Report-1.pdf)

Biographie

Fortement inspirées par la culture atikamekw, les œuvres de Catherine Boivin ouvrent des réflexions sur l’actualité, la modernité et l’histoire. L’artiste aborde des thèmes touchant particulièrement les peuples autochtones, tels le rôle des femmes, les critères de beauté, les stérilisations forcées, l’occupation du territoire et le colonialisme. Ce faisant, Boivin déconstruit les visions stéréotypées (autant positives que négatives) et propose une lecture personnelle et contemporaine de sa culture. Adepte de course à pied, de musculation et de sport, Boivin approfondi sa corporalité en questionnant comment l’endurance physique s’incarne dans les pratiques culturelles, du nomadisme à aujourd’hui. Elle travaille la peinture, la sculpture et la performance, tout en explorant des médiums tels que la vidéo, le son et le dessin numérique. À travers ses performances, l'artiste crée ses propres rituels afin de soigner les maux et réalise des gestes pour faire irradier la résilience sur les blessures. 

Originaire de la communauté de Wemotaci, Catherine Boivin est Atikamekw Nehirowisiw habitant la communauté abénakise d’Odanak. Elle a notamment participé à l’exposition collective De tabac et de foin d'odeur. Là où sont nos rêves (2019, Musée de Joliette). D’abord présentée à daphne, centre d’art autochtone autogéré (2022, Tio'tia:ke /Montréal), Nikotwaso est sa première exposition solo. Depuis 2022, elle siège sur le conseil d'administration du Wapikoni Mobile. Marathonienne, danseuse de fancy shawl, conférencière et militante, Catherine Boivin cumule plusieurs rôles dont celui de créatrice de contenu afin de sensibiliser aux questions autochtones sur les réseaux sociaux. 

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Jessie Short est artiste, cinéaste et commissaire indépendante dont la pratique interdisciplinaire implique la mémoire, la culture visuelle et l’histoire Michif. Au cours des dix dernières années, ses œuvres ont été exposées à l’échelle nationale et internationale dans des lieux tels que le Banff Centre for the Arts, le M:ST Performative Arts Festival et le Wairoa Māori Film Festival. Jessie est titulaire d’une maîtrise de l’Université Brock portant sur la culture visuelle Michif contemporaine et poursuit actuellement un doctorat à l’Université de Regina.

 

daphne est un centre d’art autochtone autogéré sans but lucratif voué à la promotion d’artistes autochtones émergent·e·s, à mi-carrière et réputé·e·s grâce à des expositions et de la programmation connexe, des ateliers, des résidences et des projets de commissariat. daphne favorise une culture de paix qui se nourrit d’échanges critiques et respectueux avec ses pairs et ses publics, qu’ils soient autochtones ou allochtones.

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Logo de la grande salle d'exposition de Caravansérailles amorces : coup d’oeil sur la vidéo émergente

Le Centre d’artistes Caravansérail propose la programmation spéciale les amorces : coup d’œil sur la vidéo émergente. De novembre 2022 à mai 2023, six expositions jetteront un regard éclectique et surprenant sur les pratiques de la relève qui centralisent la vidéo. En effet, ce médium est aujourd’hui investi par une nouvelle génération d’artistes comme un outil privilégié pour aborder des enjeux identitaires, pour mettre en images des filiations, pour parler du système de l’art ou encore pour brouiller les limites entre réalité et fiction.

les amorces sera aussi l’occasion pour Caravansérail de présenter avec plus de régularité des projets solos dans la [ petite salle ], un espace de projection à l’arrière de notre espace principal, la [ grande salle ]

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