Ce sont des naufragés de notre civilisation historique, des insulaires prisonniers dans les marges de l’insu et de l’impensé.
Exposition de Jacynthe Carrier,
du 12 septembre au 17 octobre 2009
Vernissage le samedi 12 septembre 2009 à 16 h
Jacynthe Carrier s’intéresse particulièrement à notre manière d’habiter le territoire et aux effets de la consommation et de la production humaine sur la nature. Par l’intermédiaire de mises en scène énigmatiques, elle investit des espaces demeurés vacants, corrélats résiduels de l’activité humaine. Souvent inhospitaliers, ces espaces sont des interstices oubliés ou générés par les projets de développement urbain et, par conséquent, se donnent en apparence sous une certaine sauvagerie. Situés en retrait des agglomérations humaines, ils sont par cela impensés et donc impropres à la vie humaine. Carrier profite de leur indétermination et les utilise comme des espaces métaphoriques pour y construire des tableaux photographiques dont les personnages paraissent mener une existence insolite.
Dans ses plus récentes œuvres, l’artiste investit l’espace compris sous des pylônes électriques. À la manière de tranchées pratiquées à même la forêt, les lignes de transport d’électricité tracent littéralement sur le relief terrestre le schéma de notre consommation, de l’exploitation d’une ressource jusqu’à sa consommation dans les centres urbains. Carrier utilise ces lieux reclus et transitoires pour leur ambivalence intrinsèque : comme des espaces à la fois logés au sein de la nature mais retranchés de cette dernière. Cette ambivalence topique se propage à l’existence des personnages qui semble avoir cours en marge de notre réalité. Sous les gigantesques structures d’acier, leurs moindres actions deviennent allégoriques, comme s’il s’agissait d’actes inauguraux et rituels.
Les lieux choisis par l’artiste ne sont pas a priori pensés pour la vie humaine, ce qui en fait des espaces dont le sens demeure en friche parce qu’ils existent en marge de notre conception du monde. Une ambivalence sémantique que Carrier utilise pour induire dans notre lecture une notion différente du temps. En effet, les lieux investis généralement dans ses œuvres ne semblent pas appartenir au temps historique dont nous sommes imprégnés, à la pointe duquel se formule inlassablement notre actualité.
Étudiante à la maîtrise Fine Arts à l’Université Concordia, Jacynthe Carrier œuvre principalement en photographie et en vidéo. Elle s’intéresse aux relations narratives et formelles que le corps entretient avec son environnement. Son travail a entre autres été présenté lors de la Manif 4 (Québec, 2008) et au centre VU (Québec, 2009). Tout récemment, elle participait à une résidence de production à La Bande vidéo à Québec.